Comment mettre en place sa stratégie de gamification en entreprise ?

emeRHode
7 min readJun 18, 2021

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1. Les pièges à éviter

Tout gamifier : on risque de complexifier inutilement l’activité, de perdre l’engagement de ses collaborateurs en rendant les actions confuses et donc de perdre en productivité. En plus de perdre de l’argent et du temps à développer votre système gamifié … Try again !

Voir la gamification comme la solution ultime. Non, la gamification ne résoudra pas tout. Si votre produit ou votre service ne fonctionne pas, ce n’est pas la fluidification des process qui changera les choses. Il vous faudra en amont améliorer votre produit pour qu’il corresponde aux besoins de votre marché.

Penser que ce n’est qu’une tendance. En entreprise, cela fait déjà une dizaine d’années et les 1e recherches sur la gamification datent des années 30.

Le risque c’est qu’en pensant que cela ne durera pas, vous n’allez pas investir sérieusement dans le projet. Il démarrera avec déjà du plomb dans l’aile.

2. Les étapes de la construction de sa stratégie de gamification

Votre système de gamification doit se structurer autour de 4 piliers qui vont aussi servir à hyper-personnaliser l’expérience de vos utilisateurs :

🕹️ La scénarisation et les parcours des joueurs

🕹️ Le feedback et le système de récompense

🕹️ La composante sociale

🕹️ L’esthétique et l’ergonomie

Pour construire votre système, 4 étapes sont nécessaires :

  • La définition de votre besoin
  • La conception du système,
  • Les tests utilisateurs
  • Le lancement et l’entretien de votre système gamifié

2.1. La définition du besoin de gamification

Définition de vos objectifs business :

Le jeu est avant tout un moyen d’atteindre les objectifs business de l’entreprise.

Reprenez vos objectifs à court, moyen et long terme pour créer un système cohérent, efficace et utile à la communication au moment du lancement du jeu.

Définition des besoins utilisateurs :

Vous devez identifier et comprendre vos utilisateurs. A partir de ces éléments, vous pourrez identifier leurs leviers de motivation et leurs besoins.

Gamification : profil et motivation

Délimitation des comportements cibles :

Vous pouvez déduire les comportements qui vont à la fois permettre de réaliser les objectifs business et ceux qui vont combler les besoins des utilisateurs.

Analyse des comportements ciblés :

Pour analyser les comportements que vous avez identifiés, vous pouvez utiliser le modèle comportemental de Fogg. Il identifie 2 conditions pour qu’un comportement se réalise : la motivation de l’acteur et la simplicité de l’action.

Plus une action est difficile, plus la motivation pour l’exécuter devra être importante. Pour favoriser certains comportements, il faudra faciliter la tâche le plus possible afin que vos collaborateurs rencontrent leurs premiers succès. Cela augmentera leur motivation et simplifiera l’action jusqu’à passer au palier supérieur et ainsi de suite jusqu’à l’atteinte de l’objectif.

Gamification : modèle de Fogg

Prenez en compte la motivation, les freins à l’action et les biais des utilisateurs et sélectionnez les mécaniques d’engagement qui correspondent.

4 grandes mécaniques peuvent motiver les comportements, elles se modélisent sous forme d’un Graphe des expériences (source El Gamificator) sur 2 axes selon les motivations des utilisateurs.

Gamification : graphe des expériences

2.2. La conception du système gamifié

Déterminer le parcours et concevoir les boucles d’activités :

L’objectif est maintenant d’encourager les comportements que vous avez ciblé.

Derrière la notion de parcours, on retrouve le cadre général du jeu (dynamiques de jeu). L’histoire que vous allez raconter et qui va engager vos utilisateurs, la durée du jeu, le type de jeu (coopératif ou compétitif), les éléments de divertissement et de formation pour permettre l’atteinte des objectifs.

Vous allez définir les missions de vos utilisateurs avec des buts clairs et simples et les guider pour faciliter la prise de décision notamment avec des outils d’aide à la décision, des indicateurs et des call-to-action.

Déployer les outils :

Ajoutez des récompenses pour engager vos joueurs, des encouragements et de la compétition. Les récompenses permettent d’ancrer un comportement, de favoriser l’apprentissage et de faire des feedbacks.

Les récompenses doivent être attractives et distribuées au bon moment. En fonction du comportement recherché, vous pouvez indexer les récompenses au temps passé, à des performances, ou encore bloquer des options pendant un temps donné, le temps d’acquérir certaines compétences.

Quel type de récompense attribuer ? Vous avez plusieurs possibilités, des gains virtuels ou réels :

  • des points pour gratifier vos utilisateurs,
  • des badges pour la reconnaissance,
  • des niveaux pour montrer un statut,
  • un classement dans le cadre d’une compétition,
  • des cadeaux,
  • des invitations à des événements, des éléments permettant d’aller plus loin dans le jeu (ressources, outils, argent virtuel, bonus …)

L’idéal étant de varier les récompenses pour garder un attrait. Elles doivent aussi être aléatoires.

Point culture : L’attractivité des récompenses du fait de l’aléa a été théorisée au début des années 1930 à Harvard par Burrhus Frederic Skinner grâce à l’expérience sur le conditionnement opérant qui porte son nom, la Boîte de Skinner. En synthèse, il a observé le comportement d’un rat qui était dans une boîte munie d’un système de distribution de nourriture qu’il pouvait actionner grâce à un levier. Au départ, le rat recevait la même quantité de nourriture à chaque fois qu’il actionnait le levier. Cela lui a permis d’apprendre que son action sur le levier lui donnait sa portion de nourriture. De ce fait, dès lors qu’il était rassasié, il arrêtait d’actionner le levier.

Par la suite, Skinner a rendu le système de récompenses aléatoire. Parfois le rat recevait double ration, parfois une ration normale, parfois rien ! Conséquence : le rat s’est mis à actionner le levier de manière frénétique même lorsqu’il n’avait pas faim, juste dans l’espoir de récompense.

Les encouragements peuvent prendre la forme d’une barre de progression pour avoir une vision claire de l’état d’avancement du joueur par rapport à son objectif. Cela peut également se faire via la célébration, le partage de ses victoires ou encore via des tutoriels dont la difficulté augmente progressivement.

Poser des règles claires :

Comme dans un jeu de société, on commence par regarder les règles. Même principe ici, les joueurs devront connaître les règles avant de jouer, comprendre dans quel cadre ils vont évoluer.

Créer l’expérience utilisateur :

Dans un jeu, tout se joue (sans mauvais jeu de mot) dans les 300 premières secondes. C’est comme lorsque vous achetez votre logement, vous vous faites déjà une idée lorsque vous êtes à l’entrée.

L’expérience utilisateur de votre jeu repose sur 2 piliers : le scénario et l’interface (UI)

Pour le premier pilier, les récompenses en font partie ainsi que le système de points et le système de notifications qui doit trouver le point d’équilibre entre relancer au bon moment avec le bon message pour donner envie de revenir sans harceler et dégouter l’utilisateur.

Pour le second pilier, l’interface utilisateur est importante car le joueur doit se retrouver face aux bons écrans, avoir les bons enchaînements, le bon wording (vocabulaire ou l’UX Writing) sur chaque écran pour avoir une expérience cohérente, ergonomique et visuellement attractive.

Le visuel a un rôle important à jouer, il doit servir le fond et convaincre au bout des 300 premières secondes. Il ne faut pas choisir un environnement juste parce qu’il nous plait. Il vous faut l’adapter à votre cible et veiller à la cohérence avec la charte graphique de votre organisation.

2.3. Les tests utilisateurs

Vos tests avant le lancement permettront de

  • améliorer et optimiser le jeu (sur le fond et d’un point de vue technique)
  • voir si la cible va aimer le jeu
  • si le jeu est compréhensible
  • s’il permet de réaliser l’objectif
  • Si les outils de mesures sont efficaces
  • Si le rythme est bon (temps passé sur les différents niveaux)
  • S’il permet de mesurer l’engagement (combien de fois et combien de temps le système est utilisé sur une période)
  • s’il est facile d’appropriation
  • s’il y a des baisses de performance ou des abandons et leurs raisons
  • si les règles sont bien comprises

Attention toutefois à la partialité sur le retour d’expérience au vu du travail que vous avez déjà fourni et des modifications à faire en identifiant des améliorations.

L’autre facteur à prendre en compte c’est que vous n’êtes pas votre cible et que si vous avez mal cerné un besoin ou le comportement qui en découle, cela aura des conséquences sur la suite.

2.4. Le lancement et l’évolution de votre système

Communiquer sur le jeu :

Avant, pendant et dans les premiers temps suivant le lancement du jeu, il vous faudra communiquer dessus. Comme lorsque vous mettez en place une routine, il faut du temps pour que la nouvelle action entre dans vos habitudes.

Voici quelques pistes pour votre communication :

Impliquer les managers : Les managers doivent être l’un des relais pour montrer que le jeu est important et les inciter à y aller et augmenter l’engagement. Après, il ne doit pas être le seul à porter la communication (parce qu’il a autre chose à faire 😊)

Faire un teasing

Faire un évènement pour le lancement ou un évènement au cours du jeu pour la promotion de la progression des joueurs.

Communiquer en externe sur les réseaux sociaux

Avoir des ambassadeurs.

Laisser les utilisateurs s’exprimer :

Le jeu a été conçu pour les utilisateurs (même s’il va servir les objectifs de l’entreprise), ils doivent y adhérer et s’approprier l’outil.

Le fait de pouvoir s’exprimer va permettre cette appropriation, et va permettre d’avoir des éléments concrets pour améliorer le jeu et le faire durer dans le temps pour augmenter son ROI.

Mesurer l’efficacité du programme :

Il vous faudra suivre des indicateurs pour savoir si le jeu est efficace et mener des actions nécessaires pour améliorer cette efficacité.

Parmi les KPIs que vous pouvez suivre sur l’engagement des collaborateurs :

  • le nombre de pages vues
  • le nombre d’abonnements
  • Le nombre d’utilisateurs uniques
  • Le temps moyen passé
  • Les tâches complétées
  • le contenu généré
  • La profondeur des visites
  • La conversion

Vous devez aussi mesurer le ROI, voir comment le jeu rapproche les utilisateurs des objectifs business.

Gamification : construire son système gamifié

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